La responsabilité du gouvernement devant le Parlement
Dans un régime parlementaire, le gouvernement est soumis au contrôle du Parlement qui lui accorde sa confiance. Vient-il à perdre celle-ci, le gouvernement doit démissionner. C’est le cas dans la Ve République, dont il faut souligner qu’il emprunte à la fois au régime présidentiel et au régime parlementaire : si le Parlement lui retire sa confiance, il doit démissionner. Il faut étudier trois hypothèses dans lesquelles le gouvernement met en jeu sa responsabilité devant le Parlement.
L’application de l’article 49-1 de la Constitution
Il s’agit de la question de confiance posée par un gouvernement au Parlement, qui intervient lorsque le gouvernement cherche à obtenir l’assentiment du Parlement sur la déclaration de politique générale. La procédure n’est pas obligatoire : un gouvernement nouvellement formé pourrait se dispenser de la formalité. Mais il va de soi que ne pas poser une telle question de confiance reviendrait à estimer l’Assemblée déjà hostile au programme, ce qui ne manquerait pas de compliquer les relations à venir entre exécutif et législatif. La confiance est accordée à la majorité des suffrages exprimés et le refus de la part de celle-ci d’accorder sa confiance provoque automatiquement la démission du gouvernement. Un tel cas ne s’est pas encore produit dans l’histoire de la Ve République.
L’application de l’article 49-2 de la Constitution
Il s’agit de la motion de censure spontanée. Contrairement à l’hypothèse précédente, ce sont les députés qui, cette fois, prennent l’initiative. Le dépôt d’une motion de censure doit réunir des députés signataires représentant au moins 10 % de l’ensemble des membres de l’Assemblée nationale. Après un délai de 48 heures, le vote est organisé : si la motion de censure est adoptée à la majorité des membres composant l’Assemblée (289 voix sur 577), le gouvernement doit démissionner.
Il convient de souligner que cette procédure est contraignante pour les parlementaires : ils doivent certes d’abord réunir 10 % des voix pour déposer une motion, ce qui reste du domaine du possible, mais surtout ils doivent ensuite réunir la majorité absolue des voix des députés. Autrement dit, les abstentionnistes sont supposés soutenir le gouvernement et c’est donc aux auteurs de la motion d’apporter la preuve, avec une majorité absolue de voix, que le gouvernement ne dispose plus de la confiance du Parlement.
De plus, afin d’assurer un certain rationalisme parlementaire, il n’est pas possible pour un même député de signer plus de trois motions au cours d’une session ordinaire : à lui de bien choisir. Ce dispositif a pour ambition d’éviter toute guérilla incessante parlementaire à l’égard du gouvernement en responsabilisant les députés. La somme de ces contraintes aboutit à un résultat logique : depuis la fondation de la Ve République, un seul gouvernement, celui de Georges Pompidou a été renversé par une motion de censure spontanée, en 1962.
L’application de l’article 49-3
Il s’agit de la motion de censure provoquée. Dans cette dernière hypothèse, le Premier ministre engage la responsabilité du gouvernement sur un texte, qui est adopté si aucune motion de censure n’est adoptée par les députés dans les 24 heures. Comme pour l’article 49-2, les députés souhaitant déposer une motion doivent représenter 10 % de l’ensemble des membres de l’Assemblée nationale et la motion n’est adoptée qu’à la majorité des membres de celle-ci (289 voix sur 577), entraînant dès lors la démission du gouvernement.
La procédure de l’article 49-3, bien que souvent dénoncée par les députés, est maintenant souvent employée : elle s’inscrit là encore dans le fil du rationalisme parlementaire, permettant au gouvernement de passer outre les longueurs et les tergiversations des députés, dès lors que le jeu en vaut la chandelle, c’est-à-dire que le texte à adopter justifie la mise en jeu de la responsabilité du gouvernement.
Jusqu’à présent, malgré une utilisation finalement fréquente – à près de 80 reprises – aucune motion déposée n’a réussi à recueillir la majorité des voix. Le procédé permet bel et bien de rationaliser la vie parlementaire lors de législature à la majorité faible, telle que le démontre l’utilisation massive de l’article 49-3 lors du gouvernement Rocard (près d’une trentaine de fois), qui ne pouvait pas s’appuyer sur une Assemblée majoritairement socialiste.
La réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 est venue limiter la possibilité pour le gouvernement de forcer le Parlement, revalorisant par là son rôle. En effet, le recours à la procédure de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, qui permet l’adoption d’un texte sans vote dès lors qu’une motion de censure n’est pas votée, est désormais limité aux votes sur les lois de finances et de financement de la sécurité sociale et ne pourra concerner qu’un seul texte par session.