La loi de Pareto & les concours
L’enclyclopédie Wikipédia nous apprend que Vilfredo Pareto fut un économiste distingué. Retenons pour l’essentiel, qu’il travailla sur la répartition des richesses dans la société, à commencer par la sienne, celle de l’Italie naissante à la fin du XIXe siècle.
Sa réputation ne provient pas de ses nombreux titres universitaires, dont celui de maître de conférences. Elle vient de sa “découverte”, et qui n’est pas loin d’être devenu “une loi” ou à tout le moins le principe de “distribution de Pareto”. En quoi consiste ce principe ?
Vilfredo a observé que la répartition de la richesse dans la société italienne était inégale: environ 20 % de la population détenait environ 80 % de la richesse nationale. Or, ce quota de répartition n’était pas un fait isolé: on le retrouvait dans d’autres sociétés et, manifestement, à d’autres époques.
Les épigones de Pareto n’hésitèrent pas à étendre cette observation à d’autres sphères que la simple répartition des richesses:
- aux revenus. C’est (presque) toujours vrai en France aujourd’hui par exemple: 20 % des ménages gagnent 40 % de l’ensemble des revenus
- aux plus grandes fortunes du monde. À quelques dissimulations près dans un paradis fiscal et erreurs comptables, les 20 milliardaires les plus riches possèdent 430 milliards de dollars en 2009 et les 100 milliardaires les plus riches, un peu plus de 1 000 (milliards de dollars toujours…). Soit, les 20 % les plus riches possèdent 40 % de ce que possèdent les 100 premiers milliardaires.
- à la répartition de la population dans un pays. Prenons la France: la population des 20 villes les plus peuplées représentent près de 50 % de l’ensemble de la population des 100 premières villes de France.
Pas tout à fait convaincant ?
Alors quelques exemples plus précis:
- 20 % du temps de l’année concentre 80 % de nos déplacements personnels (vacances).
- 20 % de nos doigts d’une main (index) représentent l’essentiel (au moins 80 %) des actions de pression : appuyer sur un bouton d’ascenseur, de mixeur, de souris, de jeu vidéo).
- 20 % des contribuables payant l’impôt sur le revenu représentent 80 % des impôts payés.
- Au classement de sortie de l’École nationale d’administration, les 15 premiers élèves, “la botte”, ont accès aux postes considérés comme les plus prestigieux (Conseil d’État, Inspection des Finances, Cour des comptes; du moins jusqu’en 2022). Or les promotions comptent entre 80 et 120 élèves. Là encore 80 % (voire 100 %) des postes les plus convoités étaient monopolisés par 20 % des élèves…
Ce dernier exemple nous amène au cœur du sujet de ce billet: peut-on appliquer la loi de Pareto aux concours ?
La réponse est bien sûr laissée à l’appréciation de chacun. Mais on se demandera avec profit si les 20 % du programme d’un concours ne représentent pas 80 % des sujets proposés aux concours, auquel cas, on pourrait en priorité réviser ces 20 %. Autant aller à l’essentiel…
Un exemple pas du tout représentatif mais amusant: le concours d’attaché territorial ancienne version (avant 2010). Voici les sujets proposés pour l’option de composition de droit public:
- 2000 : Le contrôle des actes des collectivités territoriales.
- 2001 : Peut-on parler d’un déclin de la loi en France depuis 1958 ?
- 2002 : Faut-il encore décentraliser ?
- 2003 : La décentralisation et le principe d’égalité.
- 2004 : La primauté des normes communautaires est-elle réellement assurée en droit français ?
- 2005 : « Acte II » de la décentralisation : quelle place pour la région ?
- 2006 : Quelles perspectives pour le statut général de la fonction publique en France ?
- 2007 : L’avenir du département
- 2008 : La loi sous la Vème République
On observe que sur 9 ans, la décentralisation représente 5 sujets (2000, 2002, 2003, 2005, 2007) sur 9. Soit 55 % des sujets proposés.
Étudions maintenant le programme prévu alors pour cette épreuve:
I. – Droit public
Droit public interne
A. – Droit constitutionnel et institutions politiques
Notions générales sur les institutions politiques.
La constitution, l’organisation de l’Etat, les divers régimes politiques, la souveraineté et ses modes d’expression.
Les institutions politiques françaises actuelles ; la Constitution de 1958, l’organisation des pouvoirs, les rapports entre les pouvoirs.
B. – Droit administratif et institutions administratives
a) L’organisation administrative :
Notions générales, décentralisation, déconcentration, cadres territoriaux de l’organisation administrative ;
L’administration de l’Etat : administration centrale, services à compétence nationale, services déconcentrés, le préfet ;
Les autorités administratives indépendantes ;
Les collectivités territoriales : la région, le département, la commune, les collectivités à statut spécial, les groupements de collectivités territoriales ;
Les personnes publiques spécialisées.
b) La justice administrative :
La séparation des autorités administratives et judiciaires, le tribunal des conflits ;
L’organisation de la justice administrative, le Conseil d’Etat, les cours administratives d’appel, les tribunaux administratifs ;
Les juridictions financières ;
Les recours devant la juridiction administrative.
c) La réglementation juridique de l’activité administrative :
Les sources du droit administratif ;
Le principe de légalité, le contrôle de la légalité, la hiérarchie des normes ;
Les actes administratifs unilatéraux, le pouvoir réglementaire ;
Les contrats de l’administration ;
La police administrative ;
La responsabilité administrative ;
La notion de service public, les différents types de services publics et les différents modes de gestion ;
Les relations entre l’administration et les usagers, la procédure administrative non contentieuse.
d) Les interventions de la puissance publique en matière immobilière :
Notions générales sur le domaine public, le domaine privé, l’expropriation pour cause d’utilité publique ;
Notions générales sur les travaux publics, l’urbanisme, l’aménagement du territoire.
e) La fonction publique :
Principes généraux de la fonction publique :
Statut, recrutement, obligations et droits des fonctionnaires.
Notions générales sur la fonction publique territoriale :
– historique ;
– les organes de la fonction publique territoriale :
– les organes de gestion : Centre national de la fonction publique territoriale, centres de gestion ;
– les organes de consultation : Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, commission administrative paritaire, comité technique paritaire ;
– la carrière du fonctionnaire territorial :
– filières et cadres d’emplois ;
– recrutement, formation ;
– positions statutaires et déroulement de carrière ;
– suppression d’emploi.
Droit de l’Union européenne
A. – Les aspects institutionnels
L’Union européenne : nature et composantes de l’Union européenne.
Les Communautés européennes : statut et compétences.
Le cadre institutionnel unique : rôle, organisation et fonctionnement des institutions et des organes.
Les processus décisionnels.
B. – Le droit communautaire
Les sources du droit communautaire : droit communautaire originel, droit communautaire complémentaire, droit communautaire dérivé.
Les différents types d’actes.
Les principes d’articulation entre le droit communautaire et le droit interne : la hiérarchie des normes, le principe de primauté, le principe d’applicabilité directe, l’effet direct.
L’incidence du droit communautaire sur le droit français.
Les juridictions communautaires : la Cour de justice des Communautés et le Tribunal de première instance.
Les différents types de recours.
Bilan: en gras, le chapitre sur les collectivités locales, c’est à dire la décentralisation: un chapitre sur environ 30-35. Ce chapitre représente, on l’a dit, 55 % des sujets proposés. Autrement dit, 5 % au mieux du programme représente 55 % des sujets proposés. Cela valait le coup de réviser sérieusement les collectivités locales…
Le sérieux n’exclut pas, parfois, un certain sens des priorités. C’est le sens de la loi de Pareto.
Pour aller plus loin
Suivez l’une de nos préparations où l’on se concentre sur l’essentiel…